Difficile de vivre avec un rythme de travail différent de la plupart des gens ! Pourtant, avec une bonne organisation, on peut trouver des aménagements et tirer avantage de la situation.
De plus en plus de salariés ont des horaires atypiques qui peuvent, en supplément. être variables d’une semaine à l’autre: certains travaillent en trois-huit, puis la nuit, le week-end, ou encore le soir… De nombreux employés de la fonction publique, du commerce, des services aux particuliers, de l’hôtellerie, de la restauration, de l’agriculture sont particulièrement touchés. Pour tous, ces horaires peuvent avoir des conséquences sur leur vie personnelle : ils voient moins leurs conjoints et enfants, ont une alimentation anarchique, manquent souvent de sommeil, donc ils ont nettement moins d’énergie.
Hélène, Sophia et Annabelle ont pourtant appris à composer avec ce rythme de vie pour pouvoir consacrer du temps à leurs proches sans être épuisées par leurs horaires.
″Pour mes proches, un rééquilibre s’imposait″
Hélène, 53 ans, divorcée, restauratrice.
Depuis dix ans je suis traiteur et je gère seule mon entreprise. Chaque jour je pars de chez moi aux alentours de midi pour livrer des repas à des entreprises, puis je rentre à la maison où j’ai deux cuisines : l’une personnelle. C’est dans cette dernière que je confectionne mes préparations culinaires. Je n’en sors jamais avant 22 ou 23h. Les mercredis, vendredis et samedis soir, j’interviens également chez des clients et je travaille alors jusqu’à minuit ou 1h du matin. Ces horaires me placent en complet décalage avec mes proches. Pendant longtemps, mes filles, ma famille et mes amis se sont plaints de ne plus me voir. Si bien que, il y a un an, j’ai décidé de rééquilibrer les choses : le soir, je ferme la porte de ma cuisine professionnelle pour ne plus envahir mon espace privé.
Ainsi, je ne travaille plus jusqu’à des heures tardives : je gagne une heure ou deux pour moi. De plus je m’accorde maintenant un jour de repos, souvent le dimanche, pour rendre visite à mes filles qui sont étudiantes. Je me suis forcée à prendre des temps de pause, dont un cours de Yoga et de chant par semaine.
Cette année, je me suis accordé la journée de Noël. Je l’ai passée en famille : c’était la première fois depuis que j’ai fondé mon entreprise. Jusqu’à présent, j’avais toujours travaillé ! Ma vie sentimentale est le seul point négatif. Le temps me manque pour provoquer des occasions de rencontre. Si je pouvais trouver quelqu’un qui ai lui même des horaires particuliers, se serait parfait, car on se comprendrait mieux !
″J’oublie mon rythme atypique !″
Sophia, 42 ans, mariée, manager dans le prêt-à-porter
Après avoir été hôtesse de caisse pendant dix ans, je me suis reconvertie dans le prêt-à-porter. C’est un domaine que j’adore et dans lequel je m’investis beaucoup. Rapidement, j’ai grimpé les échelons : vendeuse, puis responsable de rayon et, aujourd’hui, manager d’une petite équipe dans un grand magasin. Mes horaires, je les ai apprivoisés petit à petit.
Chaque jour, cela change : le lundi de 8h à 16h30h mardi 17h à 22h, mercredi et jeudi, repos, vendredi, 7h à 17h, et dimanche 9h à 14h. Je n’ai pas de famille à proximité pour m’aider. Mon fils de 6 ans va donc à la garderie et son papa le récupère le soir quand je ne peux pas le faire. Travailler le week-end est bien sûr frustrant. Mais mon mari est très présent pour Jules, notre fils. Moi, je me rattrape lors de mes jours de repos. Je l’emmène au parc, à la médiathèque … Je savoure ces moments en tête à tête où Jules a toute mon attention. Mes horaires me laissent aussi du temps en semaine pour faire du sport, voir des amies... C’est très appréciable et je ne me sens privée de rien. Seule difficulté : trouver du temps pour mon couple. Nous avons traversé une phase difficile car il se sentait délaissé.
Désormais, je m’arrange avec une amie pour qu’elle garde Jules et j’organise des sorties au cinéma, au restaurant, voire des escapades à deux pendant les vacances. Mon épanouissement au travail tient surement au fait que mon mari et mon fils vivent bien la situation. Grâce à eux, j’oublie souvent mes horaires atypiques et c’est une chance !
″Je fais tout pour compenser″
Annabelle, 45 ans, divorcée, infirmière
Ancienne restauratrice, je suis devenue infirmière libérale en 2009. Depuis, je travaille de 7h du matin à 14h30 et de 16h30 à 21h, même le week-end. Ces horaires décalés vont de pair avec un métier qui me passionne, dans lequel je me sens utile et valorisée. Néanmoins, comme j’ai quatre enfants, dont deux de 9 et 4 ans, je maintiens mon équilibre familial en travaillant une semaine sur deux. Quand je vois mes malades, mes enfants restent à la garderie, puis c’est une nounou qui accepte elle aussi, d’être en horaires décalés qui s’en occupe tôt le matin et tard le soir.
J’essaie d’assouplir mon emploi de temps : il m’arrive d’interrompre ma journée pour emmener mes enfants à leurs activités extra scolaires, par exemple, et le soir, vers 19h, je repasse parfois par la maison pour les embrasser rapidement avant que la nourrice ne les couche. Mais, surtout, je compense mon absence par mes semaines de repos : je vais alors les chercher tôt après l’école et on joue beaucoup ensemble. Mes enfants sont ma priorité : je fais tout pour qu’ils ne souffrent pas de la situation.
J’essaie aussi de préserver du temps pour moi : le lundi matin, quand je suis au repos, j’ai mon rituel : je prend un long bain pour me détendre avant d’attaquer ma comptabilité. Je vais à la piscine, chez l’esthéticienne, faire du shoping. Grâce à tous ces aménagements, je suis satisfaite, car je réussis à tirer parti de ces horaires.
L’avis de l’expert
Laurence Einfait, psychologue et formatrice en organisation personnelle •
Pour le vivre au mieux, il faut planifier
Quelle est la plus grande difficulté quand on travaille en horaires décalés ?
Le sentiment de décalage avec les autres : quand on est au travail, eux sont à la maison et inversement. Du coup, conjoint et enfants peuvent se sentir délaissés. De plus, quand on travaille en horaires décalés, on peut avoir plus de mal à récupérer, faute d’avoir un rythme fixe de sommeil et de repas, et on accumule souvent la fatigue.
Quel est le secret pour tenir ?
Il faut être encore plus organisée : cela implique par exemple de congeler des repas pour ne pas avoir à cuisiner tous les jours pour ses proches, ou encore de planifier les rendez-vous médicaux de contrôle afin de ne pas avoir à prendre sur ses moments de repos pour se rendre chez un médecin. Surtout, il ne faut pas rogner sur son temps de sommeil : ne pas se dire qu’on fera une sieste «si on a le temps».
Quelles astuces nous recommandez-vous pour bénéficier d’une aide vraiment efficace?
Mari, enfants, mamie ou amie investie, toutes les bonnes volontés sont utiles pour déléguer. De même, quand c’est possible, mieux vaut commander ses courses sur Internet au lieu de courir dans un supermarché sou prétexte «qu’on ne travaille pas l’après-midi». Enfin, pensez à planifier des rendez-vous de couple pour échapper à l’écueil du manque d’attention, phénomène courant quand on jongle avec les horaires.
• Coauteur d’Apprendre à s’organiser, c’est facile !
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